Nassouh Zaghlouleh

Colette Khalaf, Nassouh Zaghlouleh, Silence à Damas.

Capter des moments empreints de nos­tal­gie et faire res­sur­gir le passé avec émotion, c’est ce que pro­pose Nassouh Zaghlouleh dans une série de cli­chés en noir et blanc inti­tu­lée DAMAS. Un vol de pigeons, l’embra­sure d’un por­tail, les mar­ches écornées d’un esca­lier vétuste ou encore des pou­tres en bois qui lais­sent fil­trer le soleil, … autant de petits détails arra­chés au quo­ti­dien et assem­blés sous le regard du pho­to­gra­phe en un album de vie.

Né à Damas en 1958, il pour­suit des études à l’Ecole des beaux-arts de Damas, puis s’établit durant vingt-trois ans à Paris où il para­chève son cursus. Il retour­nera dans son pays natal pour ensei­gner la pho­to­gra­phie ainsi que d’autres arts visuels. Dans un pays où, comme il le dit, l’appa­reil photo est une arme plus effrayante que le fusil, heu­reux pour lui qu’il ait eu le temps de capter cette série de cli­chés qu’il expose actuel­le­ment, témoi­gnant du Damas qu’il affec­tionne. Parmi ses mul­ti­ples expo­si­tions, l’artiste consi­dère que celle-ci est la plus authen­ti­que et la plus sin­cère, « elle parle de mon enfance, de ses odeurs et de ses sou­ve­nirs. »

Argentique, numé­ri­que ? « Peu importe, répond-il. Même si la photo est prise avec un por­ta­ble, il suffit qu’elle soit réflé­chie et sentie. Regarder les points lumi­neux sur le pavé, alors qu’enfant je sau­tais à cloche-pied, obser­ver les oiseaux s’envo­ler et m’arrê­ter au pied d’un esca­lier en mar­chant avec mes vieilles tantes, ce sont des ins­tants bénis qui me revien­nent à la mémoire. »

C’est en flâ­nant tous les ven­dre­dis dès l’aube et jusqu’à la prière du matin, à l’heure où les rues sont déser­tes, que l’artiste par­vient à s’isoler avec sa ville Damas, avec laquelle il entre­tient une rela­tion intime, tein­tée d’une sen­si­bi­lité à fleur de peau. « Photographier est un pro­ces­sus que j’élabore de A à Z. Je ne me suffis pas de pren­dre la photo, mais j’effec­tue moi-même le tirage sur papier pur coton, parce que je sais exac­te­ment quel­les impres­sions je veux rendre. Parfois, je garde un écart de temps entre la photo prise et le tirage pour que l’idée soit bien "macé­rée". Il ne faut pas être trop pas­sionné pour son tra­vail, afin de garder une cer­taine "impar­tia­lité" au moment de la touche finale. Aimer pas­sion­né­ment son tra­vail, certes, mais tout en trou­vant le moyen adé­quat de le pré­sen­ter au regard des autres. »

Dans ce tra­vail mono­chrome et inti­miste, où seul le contraste entre la lumière et son absence découpe l’espace et le cadre, on croi­rait enten­dre le silence. « Auparavant, mes cli­chés res­sem­blaient à des cartes pos­ta­les, mais aujourd’hui, je m’impli­que plus dans leur réa­li­sa­tion finale et, si j’ai choisi le noir et le blanc, c’est parce que j’y trouve plus de ten­dresse ». Un long pro­ces­sus de créa­tion qui va au-delà de la simple repré­sen­ta­tion, dis­til­lant ainsi des ins­tants flot­tants, pres­que intem­po­rels.
(Colette Khalaf, L’Orient Le Jour, 09.06.2014)


Né à Damas en 1958, Nassouh Zaghlouleh détient un diplôme en com­mu­ni­ca­tion visuelle de la Faculté des Beaux-arts de Damas et un diplôme en pho­to­gra­phie de l’École natio­nale des arts déco­ra­tifs de Paris. Il a ensei­gné la pho­to­gra­phie à l’Institut inter­na­tio­nal du son et de l’image à Paris jusqu’en 2007. Il est actuel­le­ment Professeur de pho­to­gra­phie et d’art vidéo à l’Université Arabe Internationale de Syrie. L’artiste a par­ti­cipé à de nom­breu­ses expo­si­tions col­lec­ti­ves au Liban, en Syrie, aux Émirats arabes unis, en Turquie et en Espagne.
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Oeuvres dans les Collections publi­ques :

Donation Claude & France Lemand 2018. Musée, Institut du monde arabe, Paris.

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