Boutros Al-Maari, SYRIE MON AMOUR. Peintures récentes.
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« Wâ Habîbati - O mon Amour est le titre de l’une de mes peintures récentes : un homme porte sa fille dans ses bras. La petite n’a qu’une chaussure, l’autre est tombée. C’est l’une des tristes histoires des gens de notre pays. Le père porte dans ses bras le cadavre de sa fille, et du fond de la pénombre derrière lui apparaissent deux mains, pareilles à celles du Crucifié … ce même homme, le Syrien crucifié il y a deux mille ans, le revoici crucifié à nouveau. Comme sa mère Marie l’avait pleuré, il pleure maintenant sa fille, sa bien-aimée, la Syrie. D’où le titre de l’exposition SYRIE MON AMOUR. J’ai placé aussi dans le tableau la figure d’une femme que j’ai empruntée au Guernica de Picasso, pour bien signifier que la douleur humaine est la même, partout et toujours. »
(Boutros Al-Maari, Hambourg, octobre 2019)
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Du 21 novembre au 21 décembre 2019, la galerie Claude Lemand consacre une exposition personnelle aux peintures récentes de l’artiste syrien Boutros Al-Maari, qui vit à Hambourg depuis 2012. Syrie mon Amour est une exposition aux deux versants : peintures noires de scènes tragiques et douloureuses, reflets du temps présent ; peintures colorées de scènes nostalgiques et heureuses, reflets du temps jadis.
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Visites tous les jours sur rendez-vous. Tél. 06 7377 0589.
Galerie Claude Lemand : 16 rue Littré, 75006 Paris.
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Boutros Al-Maari, (Damas, 1968 - Paris - Hambourg)
Né à Damas en 1968, Boutros Al Maari est titulaire d’un diplôme en arts graphiques de la Faculté des beaux-arts de l’Université de Damas, d’un master en Anthropologie Sociale à l’EHESS Paris en 1999, puis d’un doctorat en 2006 sur l’émergence d’une peinture moderne en Syrie. Professeur dans la même la Faculté des beaux-arts de l’Université de Damas de 2008 à 2012. La guerre en Syrie l’a obligé à l’exil. Il vit et travaille à Hambourg depuis 2012.
La galerie Claude Lemand avait organisé en 2004 la première exposition parisienne de Boutros Al-Maari, pendant ses études de doctorat à Paris. En octobre 2018, il avait fait partie de la grande Donation Claude & France Lemand, offerte en octobre 2018 au Musée de l’IMA. En 2019, il avait participé à l’exposition Dessins du Monde arabe puis à l’exposition Hommage d’Artistes à Notre-Dame. Fin 2019, la galerie montre ses peintures récentes Syrie mon Amour (Wâ Habîbati Sûria) et leurs deux versants : scènes tragiques et douloureuses du temps présent ; scènes heureuses et nostalgiques du temps jadis.
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François Pouillon. Al-Maari. Peindre la Paix.
« C’est une guerre bien cruelle qui se livre aujourd’hui en Syrie. Voudrait-on l’ignorer que nous avons le témoignage d’un peintre qui a exposé récemment à Paris. Boutros Al-Maari était professeur à l’école des Beaux-Arts de Damas. Il s’est fait connaître par un art de coloriste aux tons vifs, couleurs pures en aplat, aux tableaux peuplés de personnages nerveusement griffonnés, avec leurs tarbouches, leurs turbans, leurs monocles archaïques et leurs saintes auréoles. Par ses tableaux, ses livres imprimés, il s’est fait ainsi le témoin goguenard de la vie damascène ou, en retour, de l’exotisme parisien. Car l’artiste a passé un long et fructueux séjour à Paris, pour mener à bien la rédaction d’une très sérieuse thèse de doctorat sur l’émergence d’une peinture moderne en Syrie. Il en a tiré des évocations pleines d’humour de la vie d’ici et des hommages irrespectueux aux maîtres de l’art moderne (Manet, Cézanne).
Rentré au pays, et assistant bientôt au retour d’une guerre fort peu civile, les drames de la vie quotidienne, les incertitudes sur l’avenir ont fait tourner sa peinture au noir, tant pour les tonalités que pour les thèmes : c’est désormais Goya et ses Désastres de la guerre cette fois qui semblent avoir alors donné des sujets à ses tableaux. Réfugié désormais à Hambourg, où il a mis sa famille à l’abri, c’est pourtant un autre message qu’il nous envoie, car les artistes et les historiens savent que les luttes fratricides pour être terribles, finissent toujours par s’éteindre et laisser la place à de nouvelles fraternités, à des cohabitations restaurées à travers un art de vivre reconquis. À l’horizon des orages terribles que la Syrie traverse, Boutros Al-Maari voit se dessiner un arc-en-ciel. On dit souvent que les militaires ou les politiques sont en retard d’une guerre. Les artistes, les poètes modernes eux savent être en avance d’une paix. »
(François Pouillon. Anthropologue. Directeur d’études à l’EHESS, Paris)