RANDA MADDAH,
Trois vidéos du Golan.
Donation Claude & France Lemand 2019, 2020.
Musée, Institut du monde arabe, Paris.
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Light Horizon - Horizon léger, 2012. Vidéo, 7:22.
Light Horizon est la première vidéo de Randa Maddah, filmée sur les ruines d’une maison dans le village d’Ain Fit, sur le plateau du Golan où elle est née. L’artiste restitue en plan fixe de 7 minutes son retour chez elle. De son ancien foyer, seuls demeurent quelques inscriptions en arabe et des murs criblés de balles. N’importe. Randa Maddah pénètre cet intérieur fantomatique. Elle balaie, nettoie puis contemple l’horizon de la vallée. De ce geste quotidien, a priori dérisoire voire absurde dans ce champ de ruines, naît une force capable de refouler la violence dans la contingence et de reconstruire une intimité. Un endroit où l’on a chaud, où l’on se sent bien, une maison.
Claude Lemand. « Light Horizon est une œuvre poignante. Comme Antigone qui s’acharne à vouloir honorer la dépouille de son frère, cette jeune femme nettoie, met de l’ordre et décore l’une des milliers de maisons abandonnées du Golan. Enfant, elle venait jouer avec ses camarades parmi ces maisons en ruines. Cette cérémonie est le signe de sa fidélité à cette terre spoliée, à cette population exilée, aux souvenirs de son enfance ; de sa détermination à garder vivant le souvenir de la vie sociale, de la langue, de la culture d’avant l’occupation ; de sa foi ou de son espoir qu’ils reviendront et qu’ils seront heureux, comme elle, de s’asseoir sur la terrasse et de contempler le beau paysage du plateau du Golan qui s’étend jusqu’à l’horizon léger qui se dilue dans les nuages. »
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In View, 2017. Vidéo.
Pauline de Labouley : " Randa Maddah est invitée pour quelques mois à la Cité internationale des arts de Paris avant d’être admise en 2016 à l’École nationale des beaux-arts de Paris où elle entame des études. Durant l’été 2017, elle retourne à Majdal Shams où elle tourne In View, depuis le toit de sa maison située sur la ligne de cessez-le-feu entre le Golan occupé et la Syrie. Cette installation de miroirs mobiles dévoile par intermittence les signes d’une présence militaire qui fait désormais partie du paysage. Passant de la matière à l’image, d’un expressionnisme douloureux à une mise à distance plus conceptuelle, Randa Maddah poursuit aujourd’hui un travail de réparation, en collectant des objets trouvés dans les ruines des villages détruits du Golan pour construire des histoires, comme autant de mémoires en danger d’oubli."
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Tarmîm - Restauration, 2018. Video, 11:52.
“ Those in search of themselves often cannot remember what was there before their countries were destroyed. All that remains is brittle flakes of debris invading the lacunae of their memory. Their own fragility blocks their way, while amnesia lies in ambush, and along the road rise tombstones of memory. Still, the wounded consciousness, as it makes its way from one land to another, keeps manoeuvring to avoid pain as if it never existed.
How could I understand destruction ? Borders deformed the place from which I came, changed the map, erected walls around people’s daily lives and within their language, until they had nearly forgotten it. The place that was destroyed is now devoid of human life, and now even its history has begun to vanish. Ruins dominate the scene. History and geography have been dismantled and reshaped by occupiers’ hands.
The materials used in this video are as fragile as they appear. Through it, I tried to repair the irreparable. So, I collected what was left behind by the people who once lived here, after the occupation had seized their land and expelled them. Cement shards and old photographs are all that’s left of this place that oblivion will engulf and efface. I clipped some elements from those photographs, hoping, even in despair, to find an alternative land, even if this attempt is doomed to oblivion, like the stories, like all the erased villages."