PORTRAITS DE L’OISEAU-QUI-N’EXISTE-PAS - VLADIMIR VELICKOVIC.
Claude Lemand.
Les oiseaux de Vladimir Velickovic.
Les oiseaux apparaissent pour la première fois dans Epouvantail, deux peintures magistrales de 1962 et 1963, puis ils disparaissent et ne réapparaissent qu’en 1991. Durant les années 2000, le thème du corbeau envahit l’œuvre. Velickovic peindra les séries Feux, Paysages, Corbeaux, vastes espaces dévastés par la guerre, avec au premier plan une multitude de petits corbeaux charognards. Dans d’autres compositions, de grands corbeaux-bourreaux s’acharnent sur l’homme torturé et le dévorent. Dans Piège, le corbeau finit par devenir le sujet principal et il occupe la totalité de la toile.
Dans l’univers de Velickovic, le corbeau est le seul oiseau représenté. Pas de colombe de la paix ou de l’amour fidèle, pas d’oiseaux beaux ou sympathiques, réels ou légendaires. Pour le poème de Claude Aveline, l’artiste peint un admirable tondo, sobre et puissant : un incendie au loin, un massacre d’humains à gauche, un cercle de corbeaux à droite, autour d’une fosse noire. Montrée au Grand Palais puis dans l’exposition du musée d’Issoudun, cette œuvre fait désormais partie de la Donation Claude & France Lemand au musée de l’Institut du monde arabe, qui l’a exposée en 2018-2019.
Le monde de Velickovic a toujours été violent, ponctué d’images de corps déchirés, de paysages désolés et d’animaux agressifs. La mort y est omniprésente. Sa palette est restreinte au noir, gris, blanc et rouge sang. Son corbeau est un charognard au bec et aux serres en sang. Il s’acharne sur l’homme pour achever les blessés et dévorer les morts. Son corbeau est un symbole de l’homme-bourreau. Pour lui, la haine, la torture et l’instinct de destruction et de mort caractérisent l’espèce humaine. La vie est un enfer.
Quand il réinterprète le retable d’Issenheim de Mathias Grünewald, il ne retient que le détail de la partie centrale de La Crucifixion. Dans l’œuvre de Velickovic, il n’y a pas d’espoir, pas de voyage ailleurs, pas de rêve, seulement des cauchemars. Pas d’échappatoire, pas de contrée paisible et accueillante … ni d’au-delà.